Soif d'expertise ?

Abonnez-vous à notre newsletter Tea O'Clock !

Je m'abonne

Le processus décisionnel : une vue d'ensemble - Partie 3 : La prise de décision en situation de risque

Sabrine Hamroun
Publié le
2/1/2024
Dans notre précédent article, nous avons exploré les biais cognitifs, les mécanismes qui sous-tendent ces influences et la manière de s'entraîner à les éviter. Nous présentons ici trois grands modèles de prise de décision en situation de risque. L'incertitude est l'un des aspects passionnants de la vie ! Si nous sommes constamment confrontés à des décisions diverses, bénignes ou cruciales, la plupart d'entre elles ne sont pas systématiquement certaines. C'est là que le risque entre en jeu : la probabilité d'un résultat inattendu est rarement inexistante. En matière de gestion des risques, nous ne sommes pas égaux : certains sont plus averses au risque que d'autres, tandis que certains d'entre nous recherchent davantage le risque. Une même personne peut ne pas être cohérente dans ses comportements d'aversion au risque ou de recherche du risque. Notre perception du risque peut varier en fonction de l'importance de la situation, par exemple. Les économistes et les psychologues ont proposé différents modèles pour expliquer nos comportements face à l'incertitude.

Théorie de la valeur attendue

Selon cette théorie, les décideurs humains sont des individus parfaitement rationnels et d'excellents mathématiciens, qui comparent le résultat moyen de leurs options à l'aide de cette formule :

Ici, chaque résultat de l'option est pondéré par la probabilité d'occurrence de ce résultat, où :

- EV(X) : valeur attendue d'une option X

- Xi : ième résultat de l'option

- P(Xi) : probabilité que le ième résultat de l'option se produise

Envisagez les options suivantes :

Selon cette théorie, nous devrions choisir l'option de gauche car elle rapporte, en moyenne, plus (24 €) que celle de droite (6 €). Le calcul est le suivant :

VE gauche = P(30€)30€+P(0€)0€ = 0,830€+0,20€=24€

VE droite = P(30€)30€+P(0€)0€ = 0,230€+0,80€=6€

L'une des principales limites de cette approche est que la valeur attendue est objective, alors que nos décisions peuvent être subjectives. Plus précisément, le même résultat peut avoir des effets différents selon les individus. Le même gain (perte) peut rendre une personne plus heureuse (plus triste) qu'une autre. Par exemple, l'option de gauche pourrait être moins gratifiante pour une personne habituée à des récompenses plus élevées (c'est-à-dire un gain de 80 euros au lieu de 30 euros), alors que l'option de droite pourrait encore intéresser une personne plus habituée à gagner 3 euros au mieux.

Théorie de l'utilité attendue

Cette théorie vise à dépasser les limites de la théorie précédente et à mieux expliquer le comportement humain. Elle affirme que, bien que nous soyons des individus rationnels dotés de grandes compétences mathématiques qui choisissent une option sur la base de son résultat moyen, nos choix sont toujours subjectifs plutôt qu'objectifs. Ce résultat moyen n'est pas calculé sur la base des résultats réels, mais sur la base des résultats perçus. En d'autres termes, la valeur d'un résultat est basée sur le contexte plutôt que sur la réalité. Par conséquent, l'utilité attendue est calculée selon la formule suivante :

Où ?

EU(X) = Utilité attendue de l'option X

Xi : ième résultat de l'option X

P(Xi) : Probabilité d'occurrence du résultat Xi

u(Xi) : utilité de Xi, c'est-à-dire perception subjective de la valeur Xi

Bernoulli a défini la fonction d'utilité comme logarithmique ou u(x) = log(x). La fonction d'utilité permet d'expliquer comment les gens perçoivent différemment la valeur d'une même option. L'utilité attendue d'une option augmente avec sa valeur objective (gagner 10 000 euros est mieux perçu que gagner 100 euros). Cependant, la valeur estimée d'un choix dépend de son point de départ. Par exemple, s'il reçoit 20 euros, un milliardaire sera beaucoup moins heureux qu'une personne dans le besoin. En d'autres termes, l'impact psychologique d'une même somme d'argent diminue à mesure que la valeur initiale est plus élevée. Ce comportement est connu sous le nom d'utilité marginale décroissante de la richesse.

Cette dernière permet d'expliquer pourquoi un consommateur est plus enclin à acheter d'autres articles si le prix des unités supplémentaires est moins élevé. Par exemple, une personne assoiffée peut être disposée à dépenser 2 euros pour acheter une bouteille d'eau, mais sachant qu'une bouteille est probablement suffisante, elle est moins disposée à payer 2 euros de plus pour une bouteille supplémentaire. Les entreprises appliquent la théorie de l'utilité espérée dans leurs campagnes de marketing. Par exemple, elles proposent un deuxième article à la moitié du prix du premier. Comme elles savent que les consommateurs sont moins disposés à acheter le second article au prix fort, le vendre à un prix réduit augmente ses chances d'être acheté.

Une limite importante de cette théorie est qu'elle suppose que nous sommes des décideurs subjectifs en ce qui concerne l'évaluation du résultat U(Xi), mais des mathématiciens objectifs lorsqu'il s'agit de la probabilité du résultat P(Xi). Néanmoins, notre perception de la probabilité d'un événement est généralement relative, influencée par différents facteurs : si nous avons vécu un résultat spécifique dans le passé, si un ami nous en a parlé, si nous nous souvenons d'avoir déjà été témoins de ce résultat, etc. Supposons que vous achetiez des billets d'avion pour des vacances et que le site web vous suggère de souscrire une assurance voyage supplémentaire en cas de maladie. Si vous vous souvenez de la fois où vous ou l'un de vos amis êtes tombé malade à l'étranger, vous risquez de surestimer la probabilité d'un tel événement et donc d'être plus enclin à souscrire une assurance.

Théorie de la prospective

Cette théorie propose de dépasser les limites de la théorie de l'utilité attendue et de mieux expliquer le comportement humain. Elle affirme que :

1- Les gens sont des décideurs subjectifs en ce qui concerne l'estimation des résultats et l'évaluation des probabilités.

2- Les événements rares ont tendance à avoir un impact plus fort sur nos décisions que ne le prévoit la théorie rationnelle classique. En revanche, les événements courants et prévisibles auront moins d'impact sur nos décisions que ne le prévoient les théories classiques. Par exemple, lors de la réservation d'un vol, même si la probabilité d'annuler le voyage est très faible, les gens peuvent avoir intérêt à payer des frais supplémentaires pour l'assurance annulation.

Ainsi, le choix d'une option est basé sur son utilité, définie par :

Où ?

Xi : ième résultat de l'option X

v(Xi) : Évaluation subjective de Xi

pi : probabilité du résultat Xi

π(pi) : la fonction de pondération des probabilités, qui reflète l'hypothèse selon laquelle les gens surestiment les événements rares et sous-estiment les événements courants.

Un aspect clé également introduit par cette théorie est que notre évaluation subjective des résultats n'est pas cohérente d'un contexte à l'autre. Elle dépend plutôt d'un point de référence dans notre esprit : sommes-nous en train de perdre ou de gagner quelque chose ? Dans une série d'expériences, Daniel Kahneman et Amos Tversky, les auteurs de cette théorie, ont montré que les gens sont plus averses aux pertes qu'à la recherche de gains, ce qui signifie que nos choix sont davantage influencés par le risque de perdre quelque chose que par la possibilité de gagner quelque chose. Nous pouvons même faire le choix "irrationnel" d'une option sous-optimale pour éviter les pertes. Par conséquent, nous avons tendance à préférer un gain garanti, même s'il est sous-optimal, à un gain risqué mais supérieur. Ce comportement peut être inversé en fonction de la probabilité de la perte ou du gain. Alors, la prochaine fois que vous prétendez être une personne qui aime le risque, réfléchissez-y à deux fois et tenez compte du contexte !

L'aversion pour la perte est largement utilisée en marketing. Par exemple, dans les offres de réduction, les entreprises ont tendance à présenter une offre sous la forme "abonnez-vous et économisez 100 euros", ce qui implique une perte de 100 euros évitée, plutôt que sous la forme "abonnez-vous et gagnez 100 euros", qui présente l'abonnement comme une décision liée à un gain.

Tableau expliquant différentes situations de choix en fonction du contexte (gain/perte) et de la probabilité (élevée/faible). Inspiré du livre "Thinking, Fast and Slow" de Daniel Kahneman.

N'hésitez pas à vous inscrire à notre lettre d'information Tea O'Clock pour rester informé de la parution de nouveaux articles et des dernières tendances du marché → la lettre d'information fifty-five

Tous les articles

Articles similaires

The decision-making process: an overview - Part 4: Nudging: the mechanisms of influence

5 minutes
Sabrine Hamroun

Le processus de décision : une vue d'ensemble - Partie 2 : La prise de décision humaine : un processus rationnel ?

05 minutes
Sabrine Hamroun

Le processus de décision : une vue d'ensemble - Partie 1 : Impact contextuel et choix

9 minutes
Sabrine Hamroun

Soif d'expertise ? Abonnez-vous à notre newsletter.

Découvrez les dernières actualités, articles, replays de webinars et événements fifty-five dans notre newsletter mensuelle Tea O’Clock.

Prénom*
Nom de famille*
Entreprise*
Langue préférée*
Email*
Merci !

Votre demande d'abonnement a bien été prise en compte.
Oups ! Un problème est survenu lors de la soumission du formulaire.